Une ville au passé grandiose: colonie romaine qui vit naître deux empereurs, capitale d'un royaume almohade qui s'étendait sur le Maghreb et la moitié de l'Espagne, unique port d'entrée de toutes les richesses d'Amérique…
Origine de Séville
L'origine de la ville de Séville est un mélange d'histoire et de mythologie. En effet, la légende attribue à Hercule la fondation de la ville de Séville, qu'il aurait appelée Ispal en l'honneur de son fils Híspalo. Cette légende se reflète dans ces vers célèbres:
Hércules me edificó
Julio César me cercó
De muros y torres altas
El Rey Santo me ganó
Con Garci Pérez de Vargas.
Hercule m'a édifié
Jules César m'a encerclé
De hauts murs et tours
Le Saint Roi m'a gagné
Avec Garci Pérez de Vargas.
Céramique d'Hercule, fondateur de Séville
Fondation de la ville par les Tartessiens
Au dela de la légende, les origines de la ville restent très mal connues. Elle a pu être fondée par les Tartessiens autour du VIIIe siècles avant J-C. Des fouilles réalisées sur le site du Carambolo (actuel Camas) sur la rive gauche du Guadalquivir, ont permis de découvrir un trésor Tartessien, ainsi que de nombreux vases phéniciens et céramiques grecques. Ces découvertes ont permis de confirmer les échanges commerciaux qui existaient entre la ville de Séville et les peuples méditerranéens. Les historiens considèrent que la région exportait des produits agricoles et miniers en échange d'objets manufacturés.
La Séville romaine
Les Carthaginois envahissent la ville en 216 avant J-C, mais leur occupation sera de courte durée puisque les romains s'en emparent dix ans plus tard, suite à la victoire de la bataille d'Ilipa. Cette victoire de Scipion ouvre la voie à la conquête de l'Hispanie qui était convoitée pour ses métaux et ses sols fertiles.
Suite à la conquête, la reconstruction de la ville commence, parallèlement à la fondation de l'établissement romain d'Itálica (proche de l'actuelle Santiponce à 10 km de Séville) pour y accueillir les vétérans des légions romaines.
Pendant des décennies, l'antique Hispalis restera à l'ombre de la prestigieuse ville d'Italica qui donnera naissance à deux empereurs romains : Trajan et Hadrien.
En 49 avant J-C, Jules César fit d'Hispalis une colonie officielle de l'empire romain et ordonna la construction d'une nouvelle enceinte. C'est le début de la renaissance de la cité qui devient une des villes les plus importantes de l’Hispanie.
Statues d'Hercule et César sur la façade de l'Hôtel de ville de Séville
Les invasions barbares
Après six siècles de domination Romaine, la crise que connaît l’empire aux IVe et Ve siècles ouvre la voie aux invasions barbares. Les Vandales s'en emparent au Ve siècle, laissant leur nom à la région d'Andalousie. Puis se sont les Wisigoths qui en font leur capitale en 461. C'est d'ailleurs sous le règne Wisigoth du IVe au VIIIe siècle que la région se convertit au christianisme.
Les luttes de pouvoir au sein du royaume Wisigoth au VIIIe siècle rendent le travail facile aux berbères venus du nord de l’Afrique.
Séville mauresque à l'ombre de Cordoue
En 711, Tariq ibn Ziyad traverse le détroit de Gibraltar (جبل طارق de l'arabe "montagne de Tariq") à la tête d'une armée composée essentiellement de Berbères. Après la victoire contre Rodéric (dernier roi wisigoth), il ignore Séville et remonte le Guadalquivir pour atteindre Cordoue, qui devient le centre du royaume d'Al-Andalous.
Le chef de Tarik, Musa ibn Nusair, resté jusqu’alors en Afrique, est appelé en renfort. Il débarque dans la péninsule en 712 et se lance à la conquête de la province de Séville. Il commence par prendre les places fortes de Carmona et d’Alcalá de Guadaíra pour encercler Séville qui est obligée de se rendre. La ville de Séville, qui s'appelle dorénavant Isbyliya (إشبيلية), tombe sous la dépendance de Cordoue.
À partir de 751, Al-Andalus fait partie du califat omeyyade de Damas. Suite à des luttes fratricides entre la dynastie des Omeyyades et des Abassides, Abd al-Rahman (dernier descendant des Omeyyades) proclame en 756 un émirat indépendant. Près de deux siècles plus tard, en 929, Abd al-Rahman III érige la ville de Cordoue au rang de califat. Le Xe siècle représente l'apogée d’Al-Andalus et de Cordoue jusqu'à la mort du calife Al-Mansur en 1002 et l'émiettement du califat.
Les Taifas et la dynastie des Abbadides
À partir de la mort d'Al-Mansur, les luttes intestines conduisent à la division d'Al-Andalus en petits royaumes indépendants appelés Taifas. C'est l'occasion pour Séville de reprendre sa place de ville de première importance. Séville déclare son indépendance et place à sa tête un nouveau prince Abú al-Qasim Muhammad ibn Abbad, de la famille des Banu Abbad, qui se proclame roi de Séville et de sa Taifa en 1023. C'est le début de la dynastie des Abbadides qui régnera sur la Taifa jusqu'en 1091 et qui sera une des époques les plus florissantes de la ville.
Les Almoravides
À la fin du XIe siècle, l'avancée des chrétiens dans le nord de l'Espagne oblige les Abbadides à faire appel aux Almoravides qui règnent sur le Maroc actuel. Le calife Youssef Ibn Tachfin lance deux campagnes en 1086 et 1088 et décide par la suite de soumettre toutes les Taifas. Séville est conquise en 1091 et elle est intégrée dans l'empire Almoravide, sans rôle central.
Les Almohades
Arrivent ensuite les Almohades qui dès 1140 prennent aux Almoravides le Maroc et continuent l'invasion de la péninsule Ibérique en 1147. Séville tombe cette même année et devient la capitale à partir de 1147.
L'architecture de Séville a connu de grandes transformations sous le règne d’Abu Yaqub Yusuf, gGouverneur de Séville puis calife en 1163. Il ordonne la construction de la plupart des monuments que vous pouvez admirer pendant la visite: la grande mosquée et le minaret (la Giralda), agrandissement de l'Alcázar, muraille de la ville, tour de l'Or...
La reconquête chrétienne
En 1212, les armées chrétiennes remportent une victoire décisive à Las Navas de Tolosa, qui ouvre les portes à la reconquête de l’ouest de l’Andalousie. La ville de Séville se capitule face aux troupes de Ferdinand III le 23 novembre 1248 après un siège de plus d'un an.
Suite à la reconquête Séville maintient son importance. Ferdinand III en fait la capitale des terres andalouses reconquises, à l'exception du royaume de Grenade qui résistera jusqu'en 1492. La ville prend de plus en plus d'importance et à la fin du XIIIe siècle elle devient la capitale d'Alphonse X le Sage, roi de Castille.
Reconquête de Grenade par les rois catholiques en 1492
Le Siècle d’Or
Après la conquête de Grenade par les Chrétiens, l’Espagne entre dans une ère d’expansion et de prospérité. La conquête des Amériques en 1492 fait de Séville l’une des villes les plus riches d’Espagne. En 1503, Séville se voit accorder le monopole du commerce entre l’Espagne et le nouveau continent. La ville s’enrichit rapidement notamment grâce à l'or et l'argent des mines du Mexique et du Pérou. Les familles sévillanes s'enrichissent rapidement et font construire de somptueux palais et églises.
Beaucoup d'artistes viennent s'y installer comme Murillo, Zubarán, Juan de Valdés Leal...
Le déclin de la ville et l'occupation française
Le déclin économique de Séville commence vers 1640 et est aggravé par la crise démographique consécutive à l'épidémie de peste en 1649, qui emporte plus de la moitié de ses habitants. Le déclin s'accentue avec la suppression du monopole sur le commerce avec l'Amérique, ce qui conduit au transfert de la Casa de Contratación à Cadix en 1717.
Le déclin se prolonge à la fin du XVIIIe siècle puis dans le courant du XIXe siècle avec la guerre d’Indépendance, pendant laquelle Séville sera pour un très court moment la capitale de l’Espagne libre, en 1809-1810.
Durant la guerre d'indépendance menée contre Napoléon Ier, la ville de Séville tente de résister à l'armée française mais elle capitule finalement devant les Français en 1810. Le 1er février, les Français entrent dans la ville, dirigés par le maréchal Claude-Victor Perrin et par José Bonaparte lui-même. Napoléon Bonaparte dira: "Mes troupes sont déjà entrées à Séville, où un formidable butin a été trouvé."
Pendant l'occupation française de Séville entre 1810 et 1812 la ville connait quelques transformation. Le couvent de La Encarnación est remplacé par un marché, où se trouve actuellement le Metropol Parasol. Les églises de La Magdalena et Santa Cruz sont détruites et transformées en places pour faciliter le mouvements des troupes dans le centre historique.
L'occupation française s'accompagne d'un grand pillage d’œuvres d'art. Plus d'un millier d’œuvres sont entreposées dans l'Alcazar et les meilleuressont envoyées en France ou à Madrid.
L'occupation dure jusqu'au 27 août 1812, date à laquelle Séville est reprise par les Espagnols avec l'aide des Britanniques lors de la bataille du pont de Triana. La guerre continue dans la péninsule et avec l’aide des Britanniques, les Français sont chassés d’Espagne.
En 1823, Séville donne asile aux Cortes chassées de Madrid par le gouvernement absolutiste de Ferdinand VII.
Le lent réveil du XXe siècle
Au début du XXe siècle, Séville retrouve un peu de sa splendeur avec l’exposition hispano-américaine de 1929 qui laisse quelques très beaux monuments (la place d'Espagne, le parc María Luisa, l’hôtel Alfonso XIII, le théâtre Lope de Vega...). Malheureusement, la crise mondiale de 1929 coupe cet élan.
En 1936 la ville connait un épisode sombre de son histoire lorsque l’armée de Franco attaque les quartiers populaires de la ville pour en prendre possession.
Lorsque l’Andalousie acquiert le statut de communauté, en 1982, Séville en devient la capitale. Par la suite, l’exposition universelle de 1992 lui permet de moderniser ses infrastructures (aéroport, ponts, hôtels...).
Séville a été fortement touchée par la crise de 2007 et le taux de chômage a atteint des sommets historiques comme dans le reste de l’Andalousie. Cependant, l'économie se modernise et les charmes de la ville permettent d'attirer de nombreux visiteurs tout au long de l'année. Le tourisme représente plus de 25% des emplois de la ville! Merci à vous d'y contribuer 😉